GVC 14-18

Le service de la garde des voies de communication en France pendant la Première Guerre mondiale

PROPAGANDE ET PHOTOGRAPHIES DE GVC



Dès 1914, des cartes postales représentant le conflit sont éditées en grand nombre, elles sont publiées dans des séries aux titres évocateurs : « 1914 », « LA GRANDE GUERRE 1914 », « CROQUIS DE GUERRE 1914», « La grande Guerre 1914-15 », « La Guerre 1914-1915 », « Guerre Européenne 1914-1915 », etc...

Pour illustrer ces cartes les éditeurs utilisent, dès la mobilisation, des vues de troupes photographiées à l'arrière des zones de combat. Puis aussi des vues prises peu après les affrontements dans des secteurs qui ont été traversés par les combats de mouvement de l'été 1914, avant que le front ne se fige dans les tranchées.

Mais ils ne disposent pas de clichés des combats eux-mêmes. Pour pallier ce manque et enrichir leurs séries avec des images d'action, ils utilisent abondamment des photographies réalisées lors de manoeuvres militaires d'avant guerre, plus ou moins scénarisées pour le photographe, parfois retouchées ou colorisées, ou des photographies d'événements reconstitués ou mis en scène, en général à l'abri de la zone des combats.

Quelle que soit l'origine des images, les cartes sont diffusées avec des titres et légendes évoquant des événements de la grande guerre, certaines photographies font même l'objet de plusieurs tirages avec des légendes différentes. Il convient donc de rester prudent quant à l'identification des images de ces séries dont le contenu doit toujours être examiné avec attention et ne pas se limiter à la reprise des commentaires imprimés sur les cartes.

Quelques unes de ces cartes postales dévoilent de belles photographies de GVC utilisées dans cet effort de propagande. Quelques exemples en sont présentés ici, aucune des légendes sur les documents d'origine ne précise que les hommes photographiés sont des GVC.

Des défenseurs pugnaces...




Les trois premières vues permettent de reconnaître des images du même groupe, publiées dans des séries différentes d'éditeurs distincts. Les trois cas évoquent des scènes de combat : charge le long d'une voie ferrée, défense derrière un mur, Fantassins derrière une barricade sur la route. Les troupes photographiées sont désignées « infanterie française » ou "Fantassins Français" sans autre précision.




En réalité il s'agit de mises en scène, les photographies ont pu être prises avant guerre lors de périodes d'exercices de GVC, ou hors de la zone des combats auprès d'un poste de GVC mis en place à la mobilisation.


Sur cette troisième vue, l'angle de prise de vue masquant totalement les brassards portés au bras gauche, il n'est possible de savoir qu'il s'agit de GVC que si l'on connait la carte postale précédente qui permet de reconnaître le groupe et le paysage. Cette carte postale est présentée ici sous deux tirages différents : l'un en 1914 avec légende uniquement en français, l'autre en 1917 avec légende en trois langues : français, anglais et russe.

La légende de 1914 nous situe la vue dans le Nord, l'usage de ce qui pourrait être des wagonnets à charbon pour barrer la route pourrait conforter cette localisation.

Les légendes bilingues français / anglais, ou français / russe, et trilingues français / anglais / russe, sont fréquentes sur ce type de carte et sont encouragées pour l'anglais par la présence en France dès le début de la guerre des soldats alliés du corps expéditionnaire britannique (BEF : British Expeditionary Force), puis à partir de 1917 par l'arrivée des Américains ( de l'AEF : American Expeditionary Forces), et pour le russe par l'arrivée en renfort dès 1916, en France et à Salonique, aux côtés des troupes françaises, d'un corps expéditionnaire russe.



Deux GVC ont pris la pose du tireur à genoux derrière le ballast de la voie pour cette autre photographie réalisée dans les mêmes conditions que les trois premières, la légende est cette fois beaucoup plus précise en indiquant que les hommes sont des « Territoriaux Français gardant une voie ferrée ».

Interrogatoire !



Cette saynète est une simulation dont tous les acteurs sont des soldats...français !

Le casque à pointe semble un peu petit pour le soldat « allemand » de droite, mais surtout nos deux prisonniers de circonstance sont trahis par les brodequins français et bas de pantalons sombres identiques à ceux des gardes qui les entourent.



La légende indique que la scène se déroule à Vassincourt, ce village de la Meuse a été le théâtre de violents combats entre les 6 et 12 septembre 1914, durant lesquels il a été intensivement bombardé et en très grande partie détruit, si la photographie a réellement été prise dans ce village, ce qui n'est pas certain, elle l'a été vraisemblablement avant septembre 1914.



Sur ces premières photographies nous distinguons clairement les brassards permettant de reconnaître des GVC, portés par une partie ou la totalité des hommes photographiés, ils sont du modèle bleu conforme à l'instruction générale de 1910.

Les hommes portent les effets et équipements prévus pour les GVC postés dans les régions exposées aux incursions de l'ennemi (képi, capote et pantalon d'infanterie ; ceinturon avec 1 seule cartouchière, fusil modèle 1874 avec baïonnette).

Le repos du guerrier.


Ce document est certainement le plus étonnant de ces exemples tant la légende est éloignée de la réalité de la scène présentée par la photographie : « Sur le front. Après une charge à la baïonnette, le repos semble délicieux à nos braves. »

Cette même photographie a aussi été publiée par un autre éditeur ( J. Coursier. 8, rue Simon-le-Franc. Paris) avec une variante de légende : « Région de SOISSONS. Campement avant le retour dans les tranchées. »



Nous sommes là très loin du front et des tranchées. En effet ces hommes sont clairement identifiables comme des GVC par le port au bras gauche du brassard du type tricolore prévu par l'instruction de 1887.


Les képis sont bien des exemplaires de collection d'instruction, dont sont normalement dotés les GVC à la mobilisation, identifiés ici par la petite pastille claire visible sur quelques-uns d'entre eux (par exemple celui de l'homme assis à gauche).

Les vestes et pantalons blancs portés par une partie des gardes sont les bourgerons de toile et les pantalons de treillis que doivent porter les GVC dont les postes sont situés en dehors des zones considérées comme exposées aux incursions de l'ennemi, selon l'instruction générale de 1910.

Ces hommes n'ont pas vocation à charger à la baïonnette et encore moins à rejoindre les tranchées.

Les autres types de vêtements visibles, notamment la veste sombre et la casquette plate de l'homme assis à l'arrière plan à droite, sont des habits civils couramment portés même en service par les GVC de l'arrière.

Une fois identifiée la nature réelle du contenu de l'image, cette photographie se révèle un document très intéressant et, fait très rare, qui dévoile l'intérieur d'un cantonnement de GVC, ici installé dans une grange ou un entrepôt. Les conditions de vie sont assez sommaires : la paille au sol servira pour le couchage, les vêtements, armes, équipements et matériels divers sont rangés comme il se peut à l'aide des quelques étagères et crochets disponibles le long des murs.



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