Jugulaire sur le dessus de la visière
Sur la grande majorité des photographies de gardes des voies de communication (GVC), comme sur les deux premières vues ci-dessous, les gardes ne portent pas la jugulaire du képi sous le menton, mais laissent celle-ci tendue contre le bandeau du képi, juste sur le dessus de la visière.
Jugulaire sous le menton
Toutefois sur quelques autres photographies de GVC, certains hommes posent avec la jugulaire sous le menton, comme c'est le cas pour les photographies de groupe ci-après.
Dans la très grande majorité des cas pour lesquels j'ai pu voir sur une photographie, un GVC portant la jugulaire sous le menton, ce GVC porte aussi son arme.
C'est le cas des deux photographies ci-dessus, en effet pour chacune, les deux seuls hommes portant fusil et ceinturon sont également les deux seuls hommes avec la jugulaire sous le menton.
C'est encore le cas pour la vue suivante : les seuls quatres hommes avec jugulaire sous le menton sont les seuls hommes armés de leur fusil.
ART. 13.
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Les détachements affectés au service de garde sont soumis aux
réglements militaires ainsi qu'aux prescriptions de la présente
instruction. |
Que prévoient donc les réglements
militaires à propos du port de la jugulaire du képi ?
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Le port de la jugulaire dans
les règlements militaires
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La note la plus ancienne dont j'ai pu trouver trace sur le sujet est
une note ministérielle du 3 avril 1884, relative à l'application de
différents articles du règlement du 28 décembre 1883, sur le service
intérieur des troupes, il s'agit des articles :
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" [...] Le Ministre
a également décidé que, jusqu'à nouvel ordre, l'insigne de service soit
à pied, soit à cheval, consiste dans le port de la jugulaire passée
sous le menton." |
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Cette
notion est transposée dans les termes suivants au règlement sur le
service intérieur des troupes d'infanterie (ici selon la version du
décret du 20 octobre 18923) :
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ART.279 "
[...] Dans chaque arme, des dispositions particulières déterminent
l'insigne dont le port constitue la tenue de service.
Pour
l'infanterie, l'insigne de service consiste dans le port de la
jugulaire sous le menton. [...] "
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La
consultation de divers autres règlements militaires permet de préciser
davantage la question. Ainsi le guide militaire des étudiants et des
médecins et pharmaciens de réserve et de l'armée territoriale4 ,
en 1897, stipule :
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"Le
képi doit toujours être porté avec la jugulaire au-dessus de la visière
; passée sous le menton, soit à pied, soit à cheval, elle constitue
l'insigne de service commun à toutes les armes, [...] " |
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L'instruction de 1912 sur la tenue, le paquetage et le transport des
effets et des vivres dans les unités de l'artillerie5,
est encore plus précise sur le port du képi et de sa jugulaire : |
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"
26. Insigne
de service.__
Est constitué par le port de la jugulaire sous le menton. N'est porté
que dans les cas déterminés par les règlements et instructions en
vigueur."
et plus loin : " 49. [...] Le képi,
placé droit et d'aplomb, emboite complètement la tête ; le dessus est
rentré très régulièrement sur tout son pourtour. La jugulaire,
lorsqu'elle est mise sous le menton, touche le visage, en arrière des
joues, sans serrer ni être flottante ; lorsqu'elle repose sur la
visière, elle doit être appliquée contre le bandeau."
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Ces dispositions sont encore en vigueur pendant la Première Guerre mondiale ainsi qu'en témoigne le Guide Fournier6 édition 1916-1917 : |
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" INSIGNE DE SERVICE .__ Est constitué par le port de la jugulaire sous le menton. N'est porté que dans les cas déterminés par les règlements et instructions en vigueur." | |||
Ces
jeunes hommes du 128ème régiment d'infanterie en grande tenue de
service, portent sous le menton la jugulaire de leur képi de grande
tenue
pourvu de l'ensemble grenade, cocarde et pompon, en usage seulement
entre 1887 et 1910, datant la prise de vue durant cette période.
Ces
hommes du 65ème
régiment d'infanterie avant guerre sont de service de garde à l'entrée
d'une caserne, ils portent donc règlementairement la jugulaire sous le
menton comme insigne de service7.
Détachement
du 57ème
régiment d'infanterie de Bordeaux assurant un service de garde dans une
prison de la ville - janvier 1912 - excepté les deux soldats dos au mur
sur la droite, tous portent l'insigne de service constitué par la
jugulaire sous le menton - le deuxième homme debout à droite porte
l'uniforme des personnels de la pénitenciaire8.
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Ces
hommes du 5ème régiment du génie assurent la garde
d'installations ferroviaires durant la grande grève des chemins de fer
de 1910. Il est
à noter que seul le
soldat effectivement en sentinelle avec l'arme à l'épaule porte
l'insigne de service : la jugulaire sous le menton.
Il se distingue aussi des autres soldats ici photographiés par ses pans de capote tombant droit sur l'avant de ses jambes, tandis que tous les autres hommes portent les pans de capote écartés relevés et boutonnés par leur coin vers l'arrière. Ce dernier détail devait relever également d'une consigne vestimentaire pour les militaires assurant certains services de garde en temps de paix, car tous les hommes des trois photographies précédentes portent également les pans de capotes tombant sur l'avant de la même façon que pour cette sentinelle. Cette photographie met en évidence la différence de port des éléments de tenue entre l'homme de service et les autres soldats, dont ce n'est visiblement pas le tour de garde, et montre tout l'intérêt de ces règles vestimentaires : ici avec sa jugulaire sous le menton et ses pans de capote tombants, l'homme de service se distingue au premier coup d'oeil de ses camarades. |
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Pendant
la guerre
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Ces
soldats du 22ème régiment d'infanterie assurent la garde
d'une usine
réquisitionnée par le service de la sous intendance, probablement en
1914. Là
encore seuls les deux hommes armés ont mis la jugulaire sous le menton
comme insigne de service.
De service de garde à l'arrière, ces hommes ne portent, comme les GVC, que le ceinturon avec une seule cartouchière, mais leurs armes sont tout de même ici les fusils Lebel dont sont dotés les régiments en campagne en 1914. |
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Les
deux hommes à l'arrière plan portent des uniformes d'agents de police.
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Photographie prise probablement en 1914 dans le Puy-de-Dôme, dans les environs de Riom, ville de dépôt des unités représentées, ou de Cellule, commune proche de Riom, d'où la photo-carte a été écrite au dos.
L'officier au centre porte le numéro du 97ème
régiment d'infanterie territoriale de Riom, sur le second rang les deux
hommes qui ne portent pas de capote portent des effets marqués au
numéro du 13ème escadron du train, de la même région
militaire, les capotes et képis des autres hommes sont marqués au
numéro du 105ème régiment d'infanterie de Riom.
Toutefois ces hommes paraissent trop âgés pour être des membres de ce
régiment d'active en campagne, il s'agit sans doute de réservistes ou
territoriaux, ils ne portent d'ailleurs pas des effets neufs de la
collection de guerre, mais, comme les GVC, ils ont été dotés de képis
et
capotes usagés de la collection N°3, dite "collection d'instruction",
reconnaissables aux petites pastilles claires visibles sur le devant de
nombreux képis, et près du numéro de col de quelques capotes ; ils ont
quand même perçu des fusils Lebel, alors que les GVC étaient tous dotés
de vieux fusils Gras obsolètes en 1914.
Ils appartiennent peut-être à l'une des compagnies de dépôt de l'un des régiments de Riom. On
remarque que les seuls quatre hommes armés, assurant un service de
garde quelconque, portent la jugulaire sous le menton dans le respect
des règlements militaires.
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Le respect du règlement par les GVC en service ?
Le service pour les GVC consistait en un service de garde exécuté par des sentinelles fixes ou des patrouilles pédestres, composées chacunes de deux hommes ; dès la mise en place des postes de GVC, ce service de garde fonctionnait en continu de jour comme de nuit 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, il y avait donc en permanence des GVC de service1, censés selon les réglements évoqués ci-dessus porter la jugulaire sous le menton pendant leur service.
Pour assurer une sentinelle
double ou une patrouille de deux hommes en continu, les plans du
service de garde des voies de communication, élaborés dès avant guerre,
prévoyaient la mobilisation de huit hommes1,
nous avions donc théoriquement en permanence au sein des postes de GVC,
jusqu'à six hommes au repos ou vacquant à diverses occupations liées à
la vie quotidienne du poste (donc avec la jugulaire par dessus la
visière), pour chaque paire d'hommes de service de garde actif (donc
avec la jugulaire sous le menton).
Il n'est pas si simple de
constater le respect ou non, par les GVC, du
port de l'insigne de service constitué par la jugulaire, au vu des
photographies.
En effet, par définition, globalement les hommes qui posent pour le photographe ne sont pas de service, il est donc assez logique que la très grande majorité des GVC photographiés (le plus souvent en pose de groupe avec ou sans leurs armes), ne portent pas l'insigne de service et conservent la jugulaire au-dessus de la visière.
Cette
fois également l'homme de service est photographié devant sa guérite de
garde.
Il porte bien sa jugulaire sous le menton comme prescrit par les réglements. Il a été rejoint pour la photographie par deux camarades non armés, visiblement au repos. Ces derniers portent logiquement la jugulaire au dessus de leur visière. Même remarque que sur la photographie précédente s'agissant de la baïonnette. |
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Les
baïonnettes sont cette fois au fourreau et pas fixées au canon
des fusils, témoignant d'une vision plus naturelle du GVC de service de
jour, que sur les deux vues précédentes.
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Les membres de ce poste auraient bien fait la même démarche en rejoignant une patrouille à proximité de la voie ferrée, dont un rail est partiellement visible en bas à gauche de la vue. Le respect de l'insigne de service est moins flagrant sur ce cliché, en effet sur les trois hommes armés seul celui de gauche porte la jugulaire sous le menton. Tous les hommes en capote portent toutefois celle-ci avec les pans tombant sur le devant, de la même manière que vu plus haut sur toutes les photographies de soldats assurant un service de garde avant guerre. Le sergent en capote au centre est le chef de ce poste de GVC, l'homme à sa droite avec l'insigne de caporal sur la poitrine est son adjoint. |
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Page mise en ligne le 13 novembre 2015, actualisation des liens le 29 mai 2019